LE VOYAGE DANS LA LUNE

Lors d'un colloque d'astronomie, le professeur Barbenfouillis crée l'événement en faisant part à l'assemblée de son projet de voyage dans la Lune. Il organise ensuite la visite à ses confrères de l'atelier où l'obus spatial est en chantier. 

 

 

Réalisation : Georges Méliès

Scénario : Georges Méliès

Photographie : Théophile Michault et Lucien Tainguy

Musique : Air

Durée : 14 minutes

Production : Georges Méliès

Date de sortie : 1902

Genre : Science-fiction

 

 

Georges Méliès : le professeur Barbenfouillis, Brunnet : un astronome et spationaute, Farjaut : un astronome et spationaute, Joseph Kelm : un astronome et spationaute, Victor André : un astronome et spationaute

 

Quand il assiste à la première projection publique de cinématographe des frères Lumière le 28 décembre 1895, GEORGES MÉLIÈS appréhende instinctivement le potentiel de cette formidable invention. Faisant fi des mises en garde d'ANTOINE LUMIÈRE, persuadé que le cinéma n'est qu'une nouveauté sans lendemain, l'ancien prestidigitateur décide de créer dans sa propriété de Montreuil le premier studio de cinéma en France. Réalisateur, producteur, scénariste, décorateur, machiniste et acteur, Méliès est un homme-orchestre dont la passion enivrante pour cette nouvelle forme d'art le conduira à mettre en boite pas moins de 600 courts métrages. Si la plupart des ces productions demeurent aujourd'hui introuvables (confronté à de graves problèmes financiers après la Première Guerre Mondiale, l'artiste est contraint de vendre ses pellicules pour que celles-ci soient fondues pour en extraire l'argent), certaines d'entre elles sont néanmoins parvenues à refaire surface, parfois des décennies après leur supposée disparition.

La version coloriée du Voyage dans la Lune (fruit original du travail de Méliès, visionnaire qui avait déjà anticipé le potentiel de la couleur dans le ressenti des émotions) fait partie des miraculés dont on mesure aujourd'hui toute la splendeur. Restaurée numériquement en 2010, agrémentée d'une fantastique bande-son du groupe AIR, cette copie, loin de profaner le travail de l'auteur, rend au contraire un bien bel hommage au court-métrage, plus enjoué et savoureux que jamais.
Lune, terre de tous les fantasmes. JULES VERNE et H.G WELLS avaient décrit le satellite avec moult détails dans leurs romans respectifs DE LA TERRE À LA LUNE et LES PREMIERS HOMMES DANS LA LUNES, Georges Méliès l'a mise en images avec la naïveté d'un enfant auquel on vient d'offrir son premier télescope. D'où une conquête spatiale qui ne ressemble à aucune autre.

Monter à bord de l'obus géant, puis fouler un sol inconnu où champignons gigantesques et squelettes séléniens forment l'un des plus curieux ballets que l'univers a porté en son sein est un plaisir qui n'a pas de prix, tout comme celui d'assister à l'avènement de trucages dont l'espièglerie n'a pas été dépassée. La disparition subite des Sélénites pendant les scènes de combat et la surimpression durant le rêve des explorateurs sont autant de "trucs" qui dénotent une volonté farouche d'amener le cinéma à un niveau supérieur. 

Mais le film doit également énormément à ses décors, inouïs, c'est un euphémisme. Mettant en perspective une salle de colloque particulièrement fantasque dans sa première scène, l'œuvre n'a de cesse de laisser pantois au fil des minutes, abritant des tableaux tous plus baroques et colorés les uns que les autres, qu'ils soient terrestres (les cheminées qui crachent leur fumée en arrière-plan, l'interminable canon qui pointe vers la lune), lunaires (le palais des Sélénites, digne d'un conte des MILLE ET UNE NUITS) ou bien subaquatique (la courte incursion sous l'océan a des  relents de VINGT MILLE LIEUES SOUS LES MERS).

La réalisation statique du cinéaste n'est donc pas un obstacle : les décors, les personnages et les musiques futuristes du groupe Air (thèmes qui épousent le plus naturellement possible la cause poétique du projet) dégagent une telle énergie qu'on en oublie vite l'aspect théâtral de l'ensemble. Longtemps déconsidéré, le classique de Georges Méliès vient d'accéder à l'immortalité avec cette nouvelle version restaurée, la seule en mesure de rendre justice au talent avant-gardiste du magicien de la pellicule.

 

★★★★☆

* Images trouvées sur le net

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